jeudi 17 décembre 2009

"On sent que si on grandit, c'est pour s'en aller d'ici, ne plus jamais revenir"

Hélène MONETTE, Un jardin dans la nuit

Les loups

Nous jouons au Loup-garou. Tous ensemble au salon. Et c'est presque comme avant mais sans l'été tout autour. Nous avons plus de vingt ans maintenant.

Le maître du jeu nous demande de fermer les yeux. La nuit tombe sur le village. La sorcière ouvre les yeux, les referme, puis la voyante demande à voir une carte, se rendort. C'est ensuite le tour des loups. En silence, on pointe les joueurs endormis, puis le jour se lève. On m'apprend que j'ai été tuée.

La nuit retombe et les villageois retrouvent le sommeil. Pas moi. Je replie mes genoux contre ma poitrine et je garde les yeux grand ouverts. La sorcière, puis la voyante s'activent, referment les yeux. Puis les loups, encore. Mais je n'ai plus peur.

Plus maintenant.

mercredi 16 décembre 2009

Quelques fragments

Mon nouveau projet inclura certains fragments touchant l'univers de la danse, du rêve, mais aussi d'un rapport difficile au corps. Au corps qui change. Mon corps ton corps, cet étrange libellé, c'est un peu ça aussi.

L'étoile

La costumière avait dit, je ne rapetisse plus ton costume, compris. Qu'importe. Ce soir-là, au milieu des masques et des maisons cartonnées, ce serait toi, l'étoile. Une étoile suspendue à des fils depuis trop longtemps tirés.

Ton dos

D'un mouvement à l'autre, ton dos fragile, comme une paroi escarpée entre les lacets du justaucorps. Tu fermais les yeux parfois. Pour que ton corps, toujours plus flou, cesse d'onduler dans les miroirs.

Rubans

En cachette, tu te faufilais entre les pans de tulle et les robes de velours, épuisais les miroirs de la costumière à force d'y laisser danser ton reflet. Ton costume de souris semblait fané contre ta silhouette. Alors tu enfilais la robe colorée de Swanilda, le tutu pailleté de la Reine des Neiges. Dans ton dos, les agrafes cliquetaient, tu serrais bien fort les rubans autour de ta taille.

Tutus et tuniques

Tu carburais à l'odeur de la danse. Celle des chaussons de cuir et des collants oubliés. Celle des tutus ayant trop dansé, des tuniques satinées qu'on se dépêchait d'enlever à la sortie de la scène, comme pour se détacher des corps s'étant trop de fois pliés aux mêmes rythmes, aux mêmes pas.

Souris

Vous prépariez un ballet. Tu connaissais l'histoire. Avec le Lapin, la Chenille et les fleurs qui chantent. Tu étais petite. Trop petite pour participer au spectacle, avait dit la directrice. Mais on t'avait fait un costume à ta taille. Et sur la scène, autour d'Alice, tu avais su faire les pas. Des petits pas de souris.

Les fils

Tu avais grandi avec ton justaucorps et tes chaussons de danse. Tu te pratiquais à être légère et à te tenir très droite. Comme une poupée suspendue à des fils. Il y avait ce gros ballon aussi. Un ballon imaginé. Pour que ton port de bras soit rond et léger. Et ces petits miroirs secrets à l'intérieur de tes paumes. Des miroirs inventés. Il fallait s'y regarder pour que jamais l'image ne s'envole. Lever les yeux très haut en même temps que les bras, pencher la tête d'un côté, puis de l'autre. Le ballon ne devait pas tomber. Les fils ne devaient pas casser.

L'épicerie

Tu ne savais pas danser. Tu t'asseyais dans un coin du studio, tout près de ton papa, regardais tes copines sur le grand tapis noir. Elles dansaient. Toi, tu ne savais pas. Tu n'avais que quatre ans. Un jour pourtant, tu t'étais approchée. Tu avais oublié peut-être. Oublié que tu ne savais pas danser. Tu n'étais pas retournée dans ton coin. Papa, lui, avait pu aller faire l'épicerie.

mardi 15 décembre 2009

Du nouveau

J'ai un nouveau projet en tête. Deux en fait. Peut-être. Alors je me lance. Je laisse aller ce qui vient. Et on verra ensuite pour la forme, le ton, le reste.

Je préfère les débuts. Les débuts d'écriture. Quand tout est encore à inventer, à faire, à décider. J'en suis là. J'en profite.

Comme avant

Cette nuit, lorsque je rentrerai de la fête, de la rue à la porte, de la porte à ma chambre de petite fille, je saurai qu'étendu dans l'obscurité, papa fera mine de dormir. Comme avant. Je saurai qu'il ne fermera l'œil, rassuré, qu'une fois ma lampe éteinte, assoupie. Je ne sais pas s'il dormira.

Tout ça.

On se retrouve autour de cette table. Il neige et dehors, aucune trace de notre rivière jusqu'à loin, très loin. Il y a cinq ans que je n'ai pas donné de nouvelles. Cinq ans que je ne suis pas revenue. Et pourtant. Vous êtes tous là à sourire à mes joues un peu creuses, à chercher mon regard un peu plus triste qu'avant, vieilli. Vous êtes tous là. Avec nos noms inventés. Tout ça.

Le temps qui passe

C'est là qu'il dit: on a arrêté la pilule, enfin, on essaie. Autour de la table, on sourit, on applaudit. Je tape des mains aussi, la peau un peu figée. Poupée. Il parle de l'enfant de l'une, du deuxième de l'autre et le sens du temps qui passe, cette lourdeur qui tombe comme tout d'un coup dans les jambes, me paraît plus clair encore.

dimanche 13 décembre 2009

Magnifique

Les colliers de Charlotte Hosten. De vraies merveilles.
Découvrez son univers ici

mercredi 9 décembre 2009

Vraiment vrai

Je l'ai reçue, la revue. Une enveloppe jaune gonflée, pleine de bulles de plastique. Laissée sur le balcon enneigé parce que trop volumineuse pour passer par la fente de la porte. À l'intérieur, ma revue. Ou du moins mon texte, un peu enfoui. Juste au milieu.

Les pages étaient toutes gondolées de leur journée dans la neige. Pas grave.

C'était encore plus beau que prévu.

En librairie le 15 décembre.

mardi 8 décembre 2009

Yvonne

Mes copines m'ont offert une adorable mouche pour mon anniversaire. Elle se nomme Yvonne et provient d'une famille de mouches bien particulières confectionnées par Céline Malépart, illustratrice pour la jeunesse.

Vous trouverez sa joyeuse bande (ainsi que ma Yvonne) ici.

Ça me donne envie de créer une page pour exposer mes bijoux et pièces de poterie...

vendredi 4 décembre 2009

"Maman"



Un de mes textes sera publié dans le prochain numéro de la revue Zinc.

Un spécial "Naissances" dont voici la couverture.

Pour plus d'infos sur le numéro: cliquez ici

En librairie le 15 décembre :)

mardi 15 septembre 2009

Automne

Retour à la maison, à la table et la fenêtre, aux carnets qui se remplissent, s'empilent. L'automne, déjà, bien vivant à la sortie des vacances. Sur le trottoir, tout en bas, les petites filles et les vestes qu'on enfile par-dessus les robes, les feuilles éparses et leur craquement sec sous la semelle. Sur le chemin du retour, à l'île du Prince Édouard, les feuilles étaient jaunes, puis rouges. On vendait des citrouilles au bord des routes.

vendredi 28 août 2009

Les pieds dans le sable


Notre voyage aux îles aura son propre carnet, son propre journal ...

Suivez-nous ... !

samedi 22 août 2009

À la maison

En vacances à la maison. Les petites confitures le matin et le pain qui fait des miettes. Les marches tard le soir, la maman mouffette et ses bébés dans le jardin. La couette fleurie et la courtepointe, en boule, dans un coin de la chambre. Les foulards brillants, les livres en piles, avec les princesses et les tours. Comme avant. Et cette plante grasse que je rapporte avec moi parce que trop arrosée là-bas, à la ville. Pour que tu la sauves, papa. Des petites choses comme ça, derrière les fenêtres blanches, les planches de bois bleues. Des petites choses qui comptent quand les jours, les étés, ne s'étirent plus comme avant.

vendredi 21 août 2009

Préparatifs


On part dans une semaine et rien n'est prêt. Il n'y a que le chalet, là-bas, et le bateau aussi, qui nous attendent, paisibles. Le reste traîne encore dans les placards. Il faut choisir les livres à apporter, ceux qui reviendront avec du sable entre les pages, et le meilleur cahier aussi. Pour écrire sur la plage, sur le balcon, sous la couette, dans la voiture, sur le pont, le meilleur de tous les cahiers.

vendredi 14 août 2009

babioles

Je lis des poèmes qui parlent de dragons et de craies, de clefs et de tiroirs. J'écris des textes où les cadres dérivent, où les maisons s'éteignent. Nous avons suspendu des lanternes au balcon. Pour que les chatons de la ruelle n'aient plus peur, la nuit. À la fenêtre voisine, un homme joue du piano, seul. Emporte avec lui mes rêves d'été.

mardi 11 août 2009

Vraiment trop hâte

Le 3 septembre, nous serons sur l'eau. En route, sur le bateau.

Des avions ... de papier

L'écriture à temps plein est plus troublante que je ne l'aurais cru. Beaucoup trop de cahiers déjà remplis, beaucoup trop d'idées drôlement amassées. Pas assez de pages dactylographiées et ce projet qui n'avance pas tant, finalement. Car il est bien plus amusant de travailler d'autres textes que ceux que l'on destine à son projet de maîtrise, c'est bien connu.

En attendant que l'inspiration revienne pour le projet, j'éparpille mes textes ici et là. Une revue, un concours, etc. Espère voir revenir mes avions de papier.

lundi 10 août 2009

Les îles

On part aux îles, les îles de mon papa. Les îles de mon enfance. Les îles-de-la-Madeleine. En septembre. 7 dodos dans une petite maison, tout au bord de l'eau, du sable, de l'horizon. 7 dodos à nous. Loin, loin.

P.S.: Je ne vous oublie pas. C'est seulement que j'écris autre chose, ailleurs, ces temps-ci. Je reviendrai. Avec du sable dans mes cahiers.

lundi 29 juin 2009

Dahlia

Je suis allée passer le weekend au chalet bleu de ma tante Manon, au bord d'un lac perdu dans les montagnes. Avec des colibris partout. Là-bas, j'ai écrit, beaucoup. Quelque chose se dessine enfin. Une forme différente. Des images plus vraies. Sur la photo, un dahlia géant. Non, il n'est pas en plastique.

mardi 23 juin 2009

Nouvelle création


Bracelet créé à l'occasion de l'anniversaire de ma marraine.

dimanche 14 juin 2009

Les moutons

Il y avait ces petites particules dans l'air. Des moutons avais-tu lancé. J'avais pensé de bien petit moutons. (Ou peut-être des boules de chats?) Ils voyageaient. S'élevaient dans les airs, puis redescendaient. Comme certains manèges pour petits. J'aurais voulu avoir une clochette à faire tinter doucement. Pour accompagner leur route. Briser le silence de la fenêtre. Et faire tomber la nuit plus vite. (Mais je n'avais que le petit grelot du chat.) En étirant les doigts très loin, peut-être pourrais-je en cueillir un ou deux. Et les goûter. Lentement. Des filaments collants aux doigts. Comme de la barbe à papa. Sur le balcon d'en bas, Léo s'est gratté (faisant sursauter les puces sur son collier). Son petit grelot a résonné. Trop vite. Dans l'air, les moutons se sont mis à sautiller. Ont accéléré leur course, entraînant avec eux la roue du soleil. Je les ai comptés. Très vite. Et le ciel est devenu rose, puis mauve, puis très sombre. Le vent s'est essoufflé. Les moutons avaient disparu. S'étaient assoupis sur le rebord des trottoirs. Reprendraient leur route demain.

Pivoines

Le plan était lourd de boutons. Çà et là, des pivoines, immenses. Il fallait bien choisir et couper les tiges. Papa secouait les fleurs, tête en bas, pour que les fourmis tombent. Plus petite, j'aurais voulu agiter à mon tour ces baguettes singulières. Mais je n'étais plus petite. Et les fourmis avaient fait de mes pieds leur piste d'atterrissage. Accroupie dans l'herbe je les ai observées s'écraser sur ma peau alors que mon père, tiges en main, exauçait encore quelques vœux. Les fourmis ont cessé de voltiger. Papa a remis les fleurs à l'endroit. Nous les déposerions dans un joli vase - pas trop versant - dirait maman.

dimanche 31 mai 2009

Le banquet

J'ai rêvé à toi cette nuit. Je venais te visiter. Avec de gros bouquets de fleurs dont le feuillage caressait mes joues. C'était tard après la fermeture du petit marché. Tu m'avais ouvert la porte, sans trop regarder. Avais rapidement retrouvé ta chambre au sous-sol. Sur ton lit, elle était là, nue. Vous teniez à la main des bougies d'anniversaire. Elles crépitaient entre vos doigts. Des petits feux d'artifices. Ta mère m'attendait à l'étage. Elle me manque. Je me demande souvent si elle va bien. Dans mes rêves, ses yeux ne pétillent plus. Nous nous sommes installées à une table immense. Une table pour les banquets. Mes yeux ont scintillé: «Tout va bien. Qu'il fasse jaillir les étoiles tout en bas. Je vais bien». Autour de nous, on arrivait par dizaines. Des filles surtout. Avec des fleurs. Des pots immenses. Je ne sais pas si elles venaient pour ta mère ou pour toi. Tu n'étais pas là de toute façon. Comme à chaque fois. La salle s'est vite remplie. Ta mère était assise au bout de la table. Je ne sais pas ce que nous attendions. D'autres chandelles se sont mises à crépiter. On les berçait bien haut dans l'air, juste au-dessus de nos têtes. Et les étincelles retombaient sur nous comme des étoiles qui auraient perdu pied. J'ai cherché ta mère des yeux. Elle n'était plus là. Alors, j'ai repris le chemin du marché aux fleurs. Il était tard. J'ai enjambé la petite clôture, franchi les toiles bleues. Le murmure de la ville s'est fait plus doux. Ça sentait la terre et les pétales fanés. Dehors, la pluie s'est mise à tomber. Je ne sais pas si je suis rentrée à la maison. J'ai le souvenir d'une rue fourmillante. Et de lanternes aussi, ici et là, dans la nuit.

mardi 26 mai 2009

Racines

Un fragment de mes jardins en boîtes ...

dimanche 24 mai 2009

Au marché, nous avons acheté des petits pots de fleurs de toutes les sortes, de toutes les couleurs. Pour remplir nos boîtes à fleurs. Aujourd'hui, c'est l'été sur ma rue. Je pique donc de nouveaux fragments de carnet et retourne au balcon...

Les ourses

Écrire pour rêver le monde et me le raconter ensuite. Pour mieux le voir, le saisir. «Pour inventer le sens du fil qui nous attache». Des étoffes brillantes, quelques étoiles dans un ciel parfois sombre. Puis des fils. D'argent. Des étoiles filantes. Clignement. Scintillement. Devant toi, deux chaudrons renversés, «la Grande Ourse et la Petite Ourse». De deux tracés étranges, une mère et sa petite. Soudain le ciel s'éclaire. Et la nuit prend un tout autre sens.

Éclats

Montréal, matin sombre. Trop de vent, mon parapluie en morceaux. Au coin d'une artère, baignant au milieu de papiers froissés et de bouchons brillants, la souche d'un arbre. Oubliée. Sur le tronc, déposées, mille couleurs, des éclats de céramique. Le casse-tête fragile de saisons évanouies.

samedi 23 mai 2009

Les clochettes

Au retour, la rue Marquette m'a fait du bien avec ces parterres inégaux, ses mauvaises herbes et ses tiges de pissenlits depuis trop longtemps envolés. Au détour d'un arbre, accroupies en bordure d'une clôture, deux fillettes aux robes soleil. «Ça sent les clochettes», a murmuré l'une d'elles. Sous leurs jupes gonflées de vent, un tapis de fleurs blanches. J'ai fermé les yeux. Du muguet.

vendredi 15 mai 2009

Un mois déjà. Sans écrire. Sans mon Atelier. Je me reprends. Épingle ici trois fragments de carnets. Me prépare tranquillement à l'année d'écriture qui m'attend.

Découpes

Un parcours autour de lieux émergents, connus ou inventés. Petites découpes à la dérive. Îlots étranges errant d'un rêve à l'autre. D'une main tremblante, un tracé, hésitant, la recherche d'un fil reliant les points, pour qu'encore et toujours se redessine l'histoire.

Mon histoire, ton histoire

Une histoire toute en images. Avec des mots entre les rires. Pour combler les blancs. Une histoire, toujours, inachevée, incomplète. Rythmée par les pages que l'on tourne, les oublis que l'on soupire. Une histoire fragmentée, comme la vie, comme la grande Histoire. Une histoire à raconter pour que dans les yeux de chacun se rêvent les instants à réinventer.

Broderie

Sur une toile blanche, quelques points d'une broderie inachevée. Çà et là, des bouts de fils bleus et jaunes. Étourdis par le vent. Dans tes jumelles, du tulle, tant de rubans. Des corps tournoyant, la pointe du pied pour seul pivot. La rivière, soir d'août. Le ballet de patineurs aux piqués de ciel.

mardi 14 avril 2009

Couleurs

Tu vivais dans un monde en noir et blanc. Avec quelques nuances de gris peut-être. Un monde sans couleur. Jusqu'à ce que. Par une nuit d'hiver, un pommier tout en fleurs. Roses. Tu avais effleuré sa main, son visage, sa bouche. Goûté le rouge de ses lèvres. Étourdies de neige.

lundi 13 avril 2009

Limonade

Elles vendaient de la limonade. Sur le coin de la rue. S'étaient installées à une petite table. Avec leurs citrons bien pressés, leurs verres de plastique et une assiette de biscuits fraîchement sortis de leur emballage. "Pour ramasser des sous pour les enfants pauvres de l'Afrique. Et leur envoyer des petits animaux de compagnie". On ne pouvait que les encourager. Parce qu'à 7 ans, on aurait tant voulu. Nous nous sommes approchées. Avons commandé deux verres de limonade "s'il-vous-plaît" sans demander comment elles enverraient les petits animaux de compagnie là-bas. Mais il ne restait qu'un verre de limonade. Que la petite avait commencé à boire. "On peut partager si tu veux". Elle a versé la moitié de son verre dans un second verre. Déjà utilisé celui-là. Et nous avons dégusté le tout à petites gorgées. En prenant bien soin de ne pas avaler les pépins.

dimanche 12 avril 2009

La bascule

Nous ferons de l'océan un parc pour jouer, de nos rives opposées les dossiers d'une bascule. Et d'un élan à l'autre, nous nous partagerons la lumière, tirant tour à tour sur la nuit, puis sur le jour.

samedi 11 avril 2009

Là-bas

Cette nuit, là-bas, tout là-bas, tu célèbreras ton anniversaire, marquant le ciel de voeux secrets. Derrière toi, à mon réveil, quelques gorgées de jour à partager, vingt-sept étoiles sur lesquelles souffler.

vendredi 10 avril 2009

L'oreiller

J'ai mis mon pyjama sous ton oreiller. Pour faire comme si. Comme si tu étais là pour le creuser puis l'écraser puis le déformer encore. Pour le réchauffer aussi. Pour faire comme si. Comme si tu étais là.

jeudi 9 avril 2009

La bicyclette

Tu filerais sur ta bicyclette bleue. Sillonnerais les pages, contournerais les points jusqu'à ce que devant toi, l'horizon se déplie, te révèle sa part de blanc. Tu t'arrêterais parfois. Pour cueillir des mots. Les planterais dans le panier de ta bicyclette, de la terre humide entre les doigts. Tu oublierais quelques taches sur ton passage. Pour faire plus vrai. Puis tu reprendrais ta route, pédalerais très vite pour que les mots respirent. Laisserais leurs pétales s'envoler un à un. Pour que d'un souffle léger le paysage se colore.

mercredi 8 avril 2009

Le départ

Il avait disparu. Un sac sur l'épaule, l'autre derrière, avait aisément passé les portes qui vous sépareraient pour la prochaine semaine. Tu avais agité la main au dernier moment, juste au cas. Il ne s'était pas retourné, trop heureux de s'envoler pour la première fois peut-être. Alors tu avais serré ton écharpe, crispé les doigts, juste un peu, et tourné les talons. Pris le chemin du retour.

mercredi 1 avril 2009

Lou

«De sa fenêtre, en pyjama, Lou regarde le ciel. Elle pense aux belles de nuit et à Théo aussi.

Lou s'endort. Dans son rêve, les belles de nuit grimpent très haut. Elles emportent Lou et Théo jusqu'aux étoiles.»

*** Des nouvelles de Lou. Bientôt. ***

mardi 24 mars 2009

Brisures

Une petite fille brisée. Emportée par la mer. Sur la plage, quelques miettes. Des coquillages. Éclats de ciel. Un petit bout de fil. Effiloché. Comme une corde qui ne saurait plus danser. Là-bas, des chants de marelle, quelques couleurs oubliées. Du rose, un peu de vent, la rivière. Mes ongles dans la terre. Et ce ciel d'été. Au café, soir de neige. Une tasse de chocolat dont on aurait oublié de faire chauffer le lait. Gorge sèche. Cœur tremblant. Son sourire lointain. Trop de nuits sur la corde. En équilibre. Seule à deux. L'hiver. Mes cheveux noirs. Tes yeux dans la tempête. «Attends» Le printemps, joues humides. Et la rivière toujours. Mes lèvres crispées tout près du feu. Puis sous l'escalier. «Oublie» Quelques étoiles par temps gris. De la boue sur les joues. Pleurer le rouge des feuilles. Le grincement froid du trampoline. Demain la ville. «Tu viendras?» Derrière, la cabane, le bord de l'eau. Devant, une tour, du béton. Automne.

lundi 23 mars 2009

Tu esquisserais leur corps. Enlacés. Pour retrouver. Cette petite fille éteinte dans les feux de regards trop durs. Ce corps perdu à coups d'élans. De rêves trop blancs.

vendredi 20 mars 2009

La cinquième saison

«Ton lit, perdu dans l'océan des livres dispersés, c'était notre refuge, un peu cabane de l'enfance, ou l'éternel radeau de ces naufrages imaginaires ... Je me souviens du temps qu'on a laissé passer dans l'île de ta chambre»

«Et puis, au fil des pages, on découvrait une maison, baignée de soleils d'hiver, et le bleu et le blanc dansaient sur des choses très simples»

«... comme une odeur de café chaud dans le désordre des couleurs, j'avais ma place au creux de ta cuisine»

«Ta voix glissait sur le silence. Je te regardais de dos: tes gestes lents dans la cuisine, avec la lampe boule en papier rose. Odeurs mêlées de citron, de cannelle, c'était toi dans le rose pâle d'une lampe de papier»

La cinquième saison de Philippe Delerm : à lire
a b s o l u m e n t.

Philippe et le bonheur

«... on est amoureux qu'à bicyclette»
Philippe Delerm
La journée serait consacrée à la maison de livres. Quelques formulaires à compléter, tant de manuscrits à feuilleter. Et puis finalement. Il vaudrait mieux rester à la maison. Pour les lectures. Plus pressantes, celles-là. Avec l'université qui reprendrait bien un jour. Mais tout à coup, se balançant sur le crochet du couloir, un petit sac rempli de livres à faire rêver. Les livres d'Anna, oubliés là depuis l'automne. Il serait bon de les lui rapporter avant le printemps. Aujourd'hui? Demain? Pas le choix. Il n'y aurait ni maison de livres, ni lectures sérieuses. Que des jardins de mots, des fleurs de papier. Ne restait plus qu'à s'y plonger.

«Chez Philippe Delerm, le bonheur est indissociable de la mémoire, de cette lutte de tous les instants pour échapper au vide, à l’anonymat. Indissociable également du regard que nous portons sur notre vie, sur les gens qui la traversent, certains sans laisser de traces et d’autres qui en modifieront parfois le cours irréversiblement. Indissociable surtout de tous ces plaisirs minuscules qu'il sait si bien décrire»

mardi 17 mars 2009

Cabanes

«Beaucoup de gens dans ce monde habitent des maisons de briques et peuvent ignorer le monde extérieur. Mais mon esprit demeure sous les arbres, à ciel ouvert, reçoit directement les messages que lui apporte le vent, et, du fond de son être, répond à toutes les cadences musicales de la lumière et de l'ombre»

Rabindranath Tagore, La maison et le monde

Pour Anna

Chère Anna,
As-tu entendu, ce matin, les pas sur le toit? Ce n'était pas ton funambule, loin de là. Plutôt des raccommodeurs de ciel, voilà. Apparus aux aurores, ils ont fait fuir les étoiles et dévier le tracé des oies sauvages. Depuis, ils font vibrer les murs et s'effriter les plafonds. Ici, il pleut des cailloux. J'ai fermé la porte du vestibule. Juste au cas. Et je croise les doigts. Pour que tout finisse très vite. En attendant, je prépare des paniers de cailloux. Je t'en garde un tout près. Pour ton balcon, cet été.
Je pense à toi,
Marie

dimanche 15 mars 2009

Les rideaux de pluie


La cabane-maison devrait rester dans l'arbre. Tu partirais. Laisserais derrière la petite véranda et les rideaux de pluie, l'aquarium du vestibule et les grandes symphonies. Tu partirais. Empilerais les boîtes pour une maison au toit bien découpé. T'agripperais à la grande échelle sans plus regarder. En espérant que les plafonds, là-bas, ne soient pas tout aussi barbouillés de nuages.

vendredi 6 mars 2009

C'était l'été

Il y avait la rivière et le trampoline, la grotte hantée et le quai pour rêver. Et ces cabanes fragiles, tout là-bas sur la grève, comme des maisons d'enfants, pour jouer, oublier. C'était l'été. Un soir de septembre, nous étions revenus. Dans la tempête, des babioles oubliées, nos pas contre les planches fatiguées de la cabane. Derrière nous, la porte avait grincé. Une toute dernière fois. C'était la fin. La fin de ces étés.

jeudi 5 mars 2009

Vous attendre

Je vous attendrais à la porte. Avec une robe légère et un bouquet de fleurs. Par la fenêtre, les oiseaux se seraient remis à chanter, la cigale sortirait des limbes. Le ciel serait bleu et vous arriveriez, un à un, comme un jour de printemps. Je vous attendrais. Et soudain, vous seriez là. Tous là.


*Oui, c'est mon aquarelle que vous admirez à l'instant ;)

mercredi 4 mars 2009

La fin de l'Atelier

Tu aurais un nouvel atelier. Un atelier secret où les mots pourraient fleurir à l'abri des regards. Un atelier de papiers, de découpes et de coloris. Juste pour toi. L'Atelier Bleu fermerait ses volets. Juste un peu. Pour un temps.

vendredi 27 février 2009

La grande symphonie

Il pleuvait. Dans l'aquarium du vestibule, les courants étaient de plus en plus forts, emportaient les étoiles en petits tourbillons. De l'autre côté de la porte, les armoires étaient vides et le plancher du salon, recouvert de chaudières, de bacs, de pots, de bols et de tasses de toutes sortes. Le plafond était troué de ciel. Il y aurait une grande symphonie.

jeudi 26 février 2009

Soirs d'août


Ces soirs d'août, il était une fois, les enfants endormis, nous courrions dans la nuit. Jusqu'au trampoline, au clair de la lune, de la terre aux joues, les cheveux en rivière. Et dans le ciel, ces soirs d'août, les reflets de nos regards. Filants.

jeudi 19 février 2009

Les maisons-îles

Tant de maisons derrière toi. Portes closes, rideaux tirés. Des maisons coupées du monde. Avec leurs rêves et leur mémoire. Des maisons à la dérive. Bleus enfuis. Tatous mouvants. Comme des petits bouts de toi. Des maisons-îles. Éparpillées. Comme des petits bouts de moi. Grains de sable sur fond de vent.

mercredi 18 février 2009

100 billets

Déjà 100 billets sur l'Atelier bleu!

lundi 16 février 2009

La belle histoire

On racontait une histoire en bas. Chez les voisins. Des Portugais. Ils parlaient fort. Je ne savais pas si c'était une belle histoire. Peut-être à cause de cette langue que je ne comprenais pas. J'avais tout arrêté. Pour écouter. Cette histoire qui devait être belle. Qui devait finir bien. C'est là qu'ils se sont tus. Dans ma cuisine, je n'entendais plus. Ils chuchotaient. De la belle histoire, il ne restait qu'un souffle. Quelques remous. Un courant froid sous le linoléum. Je me suis étendue sur le sol. Lentement. Pour écouter. La belle histoire. J'ai fermé les yeux. Pour bien entendre la fin. Une fin heureuse s'il-vous-plaît.

samedi 14 février 2009

L'armoire

Une armoire. Un peu sale et sombre aussi. Avec une porte craquelée. Une armoire basse. Qui exige que l'on s'accroupisse pour en découvrir les secrets. À genoux sur le ciment froid, j'en avais effleuré la porte. L'avais fait grincer, très lentement. À l'intérieur, des pots de grès empilés, mais aussi. Les marguerites désséchées de l'été dernier. Et une petite plante parapluie. En fleurs.

jeudi 12 février 2009

L'aquarium

C'était la nuit. Une nuit de presque printemps. De pluie. Je dansais sur un rythme lent et étrange. Portais de longues jupes. Jouais des castagnettes. Plic ploc. Tu as sursauté avant moi. Interrompu ma danse. De l'eau. Fait s'évanouir mes jupes. Le vestibule. S'envoler les castagnettes. Encore.

Pieds nus, nous avons découvert le trou béant qui avait remplacé notre plafond. Un trou pour voir le ciel. Pour accueillir les oiseaux, le soleil, les papillons. Et la pluie. Notre cabane-maison s'était ouverte au dehors. Et nous avions de l'eau aux chevilles. J'ai dit "ça sent la mer".

De petits tourbillons se formaient entre mes orteils. Caressaient les algues apparues dans mes bottes. Emportaient les poissons prenant vie dans les tiennes. Tu as demandé "et si on coule?" Mais nous n'avions pas de bateau. Qu'une cabane-maison qui prenait l'eau.

J'ai refermé la porte vitrée du vestibule. Pour que le ciel s'y déverse. Tranquillement. Et qu'on y regarde tomber les étoiles. Les pieds au sec.

lundi 9 février 2009

Se perdre

Tu étais entrée dans cette salle en cherchant ceux que tu avais connus onze ans plus tôt. Mais tu n'avais reconnu personne. Que des adultes. Figés devant les photos de l'amie disparue. Alors, tu avais fouillé les visages. Lentement. Puis soudain. Tu avais vu M. puis S. puis J. puis encore C. ... Ils étaient là. Tous là. Le regard brisé. Les joues tristes. Parmi les chemises et les robes noires. Ils étaient là. Tous là. Dans leurs grands corps d'adultes. Et tu l'avais trouvée triste, la vie. Triste, oui.

mercredi 4 février 2009

Extrait de carnet * 4

J'écris pour cette vie "que l'on ne peut atteindre qu'à travers l'écriture". J'écris pour respirer le mauve du jour. Pour transformer mes peurs en volcans et les escalader, sous le regard bienveillant des étoiles. J'écris aussi pour recoller les morceaux. D'une petite fille un peu brisée peut-être. D'une petite fille transformée en adulte. Et qui cherche un sens. Un fil. Le petit pont qui relie à l'avant, à l'hier. Écrire pour recoller. Pour recoudre. Mes petits bouts de vies. Mes petits bouts de mondes. Tant d'histoires à recolorer. Tant d'images à redécouper. Pour réinventer ma grande histoire. Encore et encore. Et m'y réfugier. La nuit venue.

Extrait de carnet * 3

Écrire, donc, avec pour seuls ancrages quelques étoiles, trois volcans et le bleu de l'ailleurs. Écrire sans forme, sans limite, sans genre. Écrire. Ce qui vient, ce qui va, ce qui émerge aussi, de très loin parfois, et qui s'étend, mot à mot, sur les pages de mon carnet. Je capte et j'écris. Les images, les murmures, les silences, les couleurs. Mais j'invente aussi. Le bonheur et la douleur. Sans me demander ce que c'est. Sans me demander pourquoi ou comment. J'écris. Je ne fais pas de littérature, ce mot bien imprécis qui rythme tant ma vie d'étudiante que celle de la maison de livres où je travaille. J'écris. Pas pour les autres. Mais pour moi. Pour écrire.

Extrait de carnet * 2

Un jour, mes petits bouts de mots, mes morceaux de temps, trouveront eux-aussi leur motif. Et le fil qu'il leur faut. Alors, mes maisons, mes volcans et mes horizons auront trouvé leur place, leur couleur, dans ma grande histoire réinventée. Ce sera ma courtepointe. Ma courtepointe de mots.

En attendant, j'écris. Encore et encore. Je trace les lettres une à une, découpe mes images, les recolle, les colore. Formant ainsi un joyeux fouillis. Ce fouillis, c'est ma liberté à moi, mon coffre à idées, mon inventé. Ce fouillis, c'est mon trajet rempli de détours, ma carte sans point ni étoile. La boussole sans aiguille qui me laisse avancer.

Extrait de carnet * 1

Assise dans ma véranda, je surveille mes chatons qui dorment au soleil. Dans l'arbre, derrière, un oiseau chante. Et cette odeur de printemps qui me donne des ailes. Combien de matinées passées ici à écrire? Combien de pages, de lignes, de mots? Chaque jour, j'écris. Des petits morceaux d'histoires, des petits bouts de vies. Chaque jour, par petites découpes. Je me demande souvent où cela me mènera. Je me dis que je finirai bien par trouver le fil qui saura rassembler tous ces morceaux. Un fil de la bonne grosseur. De la bonne couleur aussi. Un fil solide.

mardi 3 février 2009

Partons

Partons. J'ai mis ma robe fleurie. Avec les pétales mauves. Toi, ton chandail vert. Un arbre. Des feuilles. Partons. Devant, la route. Là-bas, l'horizon. Très loin, notre côte. Te souviens-tu.

Au nord. C'était l'été. Le bout du monde. Une famille. Cette cabane. Pour nous. Sur la plage. Te souviens-tu. Les étoiles. Les aurores. Et ce géant sur sa chaise. Toutes ses histoires. Palourdes en poche. Le pêcheur. Les baleines. Son bateau. Les glaciers. Tous les soirs. Pour rêver.

Partons. La route. Ses sapins. Le matin. Un peu plus loin. Et la route. La route. Jusqu'à loin. Très loin. Invitons la famille. La famille de là-bas. La commère. L'épicier. Les petits. Le capitaine. Tous ces visages. Et l'homme aux histoires. Pour qu'il nous raconte. La vie. La mer. Les îles. Leurs secrets. Pour qu'il nous raconte.

Et qu'au milieu de nulle part, nous unissions nos histoires.

mercredi 28 janvier 2009

Une maison

D'abord une maison. Pour écrire. Juste à côté du monde. Juste à côté de moi. Une maison étrange. À la fois très grande et très petite. Qui ne ressemblerait à rien. Avec des tiroirs à ouvrir, des coffres à dépoussiérer, des breloques à effleurer. Une maison qui se transformerait au fil des mots, des histoires. Des briques. Un peu de bois. De la paille peut-être. Une maison ouverte sur le monde. Une maison au toit ouvert.

Un voyage


Il suffirait de gonfler ton ventre. Comme un ballon. Pour bien sentir l'air s'y mouvoir. Il y aurait des vents très chauds. D'autres plus froids. Qui souffleraient en toi. Doucement. Tu glisserais vers l'horizon. Te laisserais dériver. Jusqu'à ce qu'un courant t'accueille dans son sillon. Les marées t'emporteraient. T'abandonneraient parfois. Le temps d'une île. Ou deux. Pour dégonfler ton ventre. Un peu. Puis repartir. Ce serait simple, très simple. Il suffirait de gonfler ton ventre. Comme un ballon.

mardi 27 janvier 2009

Pour écrire - Duras

"Dans la maison c'était au premier étage que j'écrivais, je n'écrivais pas en bas. Après j'ai écrit au contraire dans la grande pièce centrale du rez-de-chaussée pour être moins seule, peut-être, je ne sais plus, et aussi pour voir le parc"

Marguerite Duras - Écrire

Les volcans


Tu écrirais sur les volcans. Du rouge du bleu du jaune. Trois volcans. Une nuit. Des étoiles pour tout le ciel.

Les volcans

Nous avions traversé la vallée. Le regard perdu dans l'infinité de la nuit. Nous marchions lentement, palpant le paysage un pas à la fois. Au loin, le grondement sourd des volcans endormis. Ils respiraient. Des géants. Assoupis. C'était une nuit comme toutes les autres. Une nuit comme nous les aimions. Étendus dans la vallée, nous avions fermé les yeux. Le souffle du vent s'était mêlé à celui des géants. Les étoiles s'étaient éteintes et les volcans, parés de mauve et d'orangé.

lundi 26 janvier 2009

Les volcans

Tu avais chez toi cette vieille commode dont le miroir avait été terni par le passé. Tu aimais en ouvrir les tiroirs, y respirer les effluves du temps, caresser les couleurs d'avant. Tu y aurais passé tes journées. Ouvrir, retrouver, découvrir. Tes tiroirs. Tous sauf un. Fermé à clef. À l'intérieur, trois volcans fumaient, encore.

yael naim


C'était dimanche. Dans la librairie aux coups de cœur, rue Saint-Denis. La voix l'avait touché. La mélodie, ému. Il n'avait pas posé de question. L'avait acheté. Simplement. Puis rapporté à la maison. Pour nos un an. C'était dimanche. Le début d'un nouvel air dans notre petit bout de maison.

samedi 24 janvier 2009

Pour écrire - suite

Tu écrirais du milieu de ton petit monde, entre les pots de caramel et les plantes parapluies, le chant de la bouilloire et les éclats du dehors. Tu mêlerais leurs histoires à la tienne, réécrirais tout, chaque jour, un peu plus. Laisserais son silence à la petite chambre. Te réfugierais ici. Pour que tes mots se colorent, pour que tes mots prennent vie.

Pour écrire - suite

Ce matin-là, tu avais pris avec toi ton carnet, le plus joli, et quelques livres, pour les avoir tout près. Tu avais quitté la petite chambre, ta table, sa fenêtre, le rideau, avais fait craquer le plancher, un pas à la fois, jusqu'à la cuisine.

Pour écrire

Tu aurais cet espace juste pour toi. Un petit coin tapissé de tes images, une grande table, cette immense fenêtre et son rideau fleuri. Un lieu comme tu en aurais toujours rêvé. Une chambre à toi. Avec tes livres jusqu'au plafond et tes boîtes de papiers, de rubans et de brillants tout près, juste au cas.



Et puis,


il nous resterait les matins et leurs morceaux de lumière.

jeudi 22 janvier 2009

Le fil de l'histoire

Toujours, ce gros fil rouge qui réapparaissait. Dans ma poche, noué à mon lacet, puis à l'anse de ma tasse, au café. Et partout, dans la boîte à thé, sous le frigo, dans mon tiroir, ou virevoltant à la fenêtre, ces petits morceaux de souvenirs frippés, décousus, rapiécés. Sur le pas de ma porte, ce matin-là, le facteur avait déposé une enveloppe bleue. Pieds nus dans la neige, je l'avais décachetée, très lentement, et avais vu s'envoler au vent un nuage de petits papiers blancs.

mardi 20 janvier 2009

Le baiser

Elle voulait écrire sur l'amour. Sur ce qui restait de l'amour, de ses amours. Elle voulait écrire sur un amour d'été. Sur un amour passé, avec un peu de présent toutefois. Il y aurait les "te rappelles-tu" et les moments là-bas. Il y aurait le souvenir d'une rencontre, de sourires, d'un bonheur. Mais le baiser, lui, serait au présent.

lundi 19 janvier 2009

La cabane-maison

Nous habitions un petit bout de maison. Tu appelais ça notre cabane-maison. Et ça me faisait rire. Quelques morceaux de murs, un plafond aux mille plic-ploc, du vent entre les orteils... Nous y étions bien. Notre cabane aurait pu être perchée au sommet d'un arbre ou piquée entre deux sapins, la vie n'aurait été que plus belle. Vivre pour jouer ou jouer pour vivre. Dans notre petit bout de monde, le but du jeu, c'était d'être heureux.

dimanche 18 janvier 2009

Et si ...

J'ai cette étrange voisine aux longs cils et aux cheveux un peu gris. Au sourire de princesse et au cœur rempli d'histoires. Une petite fille devenue grande, mais pas tellement quand on y pense. Une princesse tombée dans un monde où le rose manque parfois aux joues.

De mon côté du mur, souvent, je ferme les yeux et tente de deviner ce qu'elle peut bien être en train d'imaginer. C'est dans ces moments qu'un funambule passe son chemin, sur ma corde à linge, ou que là-bas, aux balançoires, un amoureux secret soupire. C'est comme ça, avec Anna. Comme ça.

Et si les princes charmants n'existaient pas pour vrai ...

vendredi 16 janvier 2009

Mon atelier imaginaire * 1

Mon atelier serait bleu, tout bleu. Avec de grandes fenêtres pour laisser passer la lumière. Dehors, il y aurait du ciel, beaucoup de ciel, et de l'eau aussi, jusqu'à très loin, pour mieux voir l'horizon.

Mon atelier serait rempli de vents. Des vents de la mer et de ses ailleurs. Pour faire danser les voiles suspendus aux fenêtres. Des vents du matin et de la nuit aussi. De vents qui sentiraient bon le temps.

mercredi 14 janvier 2009

Janvier

Janvier. Sur ma porte, encore, la décoration de Noël confectionnée par ma mère. Sur ma porte, encore, ces branches de sapin, ces boules éraflées par le froid, ces petits pompons de laine d'il y a si longtemps. J'étais petite. Sur la table de la cuisine, déjà, ma maman ressortait, un peu après la neige, juste avant les lumières, sa boîte de rubans, de boules et de petites figurines de bois. Dans la maison, des effluves d'hiver et des aiguilles vertes partout, sur la table et en dessous aussi. J'étais petite et pourtant. Janvier. Sur ma porte encore ... et jusqu'au printemps, peut-être.

mardi 13 janvier 2009

Tic tac

Il fallait reprendre. Reprendre du tout début. Écrire au plus près, au plus petit. Écrire. Revoir une à une les découpes de l'enfance et les retisser fleuries, puis carrelées, puis lignées. Écrire par petits morceaux, par petits bouts de temps. Par petites étoffes à recoudre serrées avec un gros fil rouge. Il fallait reprendre. Fermer les yeux et retrouver.

dimanche 11 janvier 2009

Tracés

Je colle ton corps contre mon cœur. Sur un mur bleu, ta silhouette. Je te trace jaune, un bout de craie. Je souffle sur toi. Ne t'envoles pas. Contre ton coeur, j'ai vu le jour, s'éteindre là-bas, si près de toi. Puis sur la rue, dans un grand vent, ton soleil vert, s'éparpiller. Au parc, ce soir, des arbres sans feuilles. Et toutes ces branches, piquées d'étoiles. Pour toi, pour moi, la patinoire, mes patins bleus, nos élans blancs. Main dans la main, quelques tracés, et tout un ciel pour dessiner.

Billes et boutons

Je fais des bijoux, depuis quelques temps déjà. Avec des billes, mais des boutons surtout. Les vieux boutons de ma grand-maman disparue, et ceux de mes tantes aussi. Un jour, j'aurai ma propre collection. Ma collection de bijoux de boutons, de bijoux souvenirs. Un jour, vous les retrouverez dans une petite boutique, très loin d'ici, tout près du fleuve. Un jour...

Carnets incongrus

D'abord des mots, des mots si beaux.
Des histoires aussi, par ficelles, par broderies.

Pour une vie tout en contes
De l'amour, de la magie....

Parce que c'est beau, vraiment très beau.

Carnets incongrus.

mercredi 7 janvier 2009

Pour Sissi

Chère Sissi,
J'ai passé de belles vacances aussi. Il y a eu de la neige, et du vent surtout. Dans la cuisine, les guirlandes de lumières restaient allumées jusqu'à bien tard dans la nuit, lorsque même les histoires, épuisées, s'étaient effacées. J'ai enfilé des billes de toutes les couleurs sur des fils infinis, réouvert ma boîte aux poussières et compté un à un les boutons dorés de ma grand-maman disparue. Ça sentait bon le souvenir. Je me suis vite remise de mon vilain rhume. Et j'ai retrouvé mes patins bleus. Ceux avec les lacets brillants. Sur la glace, nous avons tracé de grands cercles blancs et salué les arbres, le nez en l'air. À travers leurs branches, les étoiles nous souriaient. Et nous aussi. Je me suis dit que c'était peut-être ça, les vacances, en venir à sourire aux étoiles, simplement.
À bientôt,
Marie

Où est Lou?

Vous vous inquiétez. Il ne faut pas. Lou n'est pas partie.
Derrière son géant gris, elle attend. Avec ses nuages et ses étoiles.
Elle attend une petite place pour elle.
Et pour laisser grimper ses belles de nuit, aussi.
Avec son papillon, le vent, son coquillage, elle reviendra.
Et Théo, Safran et Pastel aussi.

dimanche 4 janvier 2009

Pour J.

À corps bleuté
tu marches
en nuit libre
.
Écoute
ce rythme chaud
qui te berce
.
respire
.
le roulis de la rivière
le chant du chemin
qui, sans heurts
te ramènera
toujours
ici

lundi 29 décembre 2008

Les oiseaux

Au jardin
quelques miettes
la neige
les brindilles

le murmure
du grand chêne
s'étirant
dans le froid

Sur le bleu
un rêve blanc
à portée
de paysage

La mangeoire
n'abrite plus
le chant
des oiseaux

Lou

C'est les vacances.
J'ai retrouvé mes carnets, mes billes, mes pastels.

J'écris une histoire, toute petite.
L'histoire de Lou, une vie de Lou.

vendredi 12 décembre 2008

Quelques jours ...

Plus que quelques jours et ce serait les vacances. Dès lors, elle rangerait les livres au placard, ne garderait sur sa table que ses carnets et couleurs. Dès lors, la vie reprendrait son cours, les jours retrouveraient leurs heures. Il y aurait les promenades et les chocolats chauds, les réveils lumineux et les histoires, tard le soir. Plus que quelques jours et la neige et les fêtes seraient à elle, plus qu'à elle.

mercredi 10 décembre 2008

À la fenêtre, plus un souffle, silence.

Le ciel avait soudain cessé de laisser virevolter la neige. L'avait retenue, lourde de sa chute, très haut dans l'air.

Sur la rue, plus que les traces des passants disparus.

Comme si le monde, sans un bruit, avait lui-aussi cessé sa danse.

mardi 9 décembre 2008

toile d'hiver

Alors que par la fenêtre, les blancs de l'hiver recouvraient le paysage, elle avait sorti de ses boîtes, de ses carnets, tous ses mots, tous ses traits, les avait étalés, papiers épars, sur le plancher.

Il lui fallait retravailler les bleus, les noirs, toucher de nouveau ses traces sur le blanc, avant qu'elles ne soient recouvertes elles-aussi.

Elle avait noué, un à un, de petits bouts de laine trouvés au fond d'un grand tiroir. En avait accroché une extrémité, puis l'autre, au cadre de la fenêtre.

Dehors, le paysage, déjà, n'était plus le même, toile de fond.

Sous la table, les chatons avaient trouvé quelques bouts de laine oubliés et trottinaient, trésors en bouche.

Ses épingles à la main, elle s'était mise à la tâche, superposant ses paysages à la toile, ballet blanc.

Bientôt, ses mots bleus, ses traits noirs, tatoueraient les aplats du dehors, animeraient l'hiver de ses traces, de ses pas.

dimanche 7 décembre 2008

arbres, horizon, mer


Bientôt, il n'y aurait plus que du gris. Elle avait roulé tout le jour, ne s'arrêterait pas pour la nuit. Par la fenêtre, les forêts bordant la route avaient laissé place au rivage, lui laissant à respirer le souffle de la mer. Il faisait froid. Demain, elle serait là.

samedi 6 décembre 2008

les brindilles

Le printemps, puis l'été, reviendraient peut-être. Il suffisait d'y croire, de voir en la lumière l'augure de jours plus jaunes après les blancs de l'hiver. Elle avait conservé chez elle quelques brindilles bien sèches qu'elle tresserait en attendant le retour des matins mauves. Elle y glisserait de petits morceaux de tissus colorés, ceux de ses robes et de ses nappes, capturant ainsi entre les brins tous ses manques à voir, à toucher, à sentir, de la couleur subtile du vent de mai aux épis rougis par le soleil, soir d'août. Tout l'hiver, elle lisserait puis tirerait puis croiserait puis serrerait ses brindilles les unes contre les autres, y entortillerait ses petits bouts de printemps, puis d'été, jusqu'à ce que tout y soit, jusqu'à ce qu'il n'y manque plus rien. Alors, il ne resterait plus qu'à les accrocher, lourdes de leurs saisons, aux poutres du balcon pour que le vent froid les caressant, s'y réchauffe, étonné.

vendredi 5 décembre 2008

Départ



Puis
tes mots fumée
sur la fenêtre froide

formes embuées
contre visage

jeudi 4 décembre 2008

Brunante

Tu tournoierais dans la brunante, striant le ciel de rainures d'or, tu tournoierais sans t'arrêter, yeux clos, lèvres scellées, tu tournoierais pour tous les autres, corps hélice, bras ailés, tu tournoierais à perte de sens, souffle court, cœur silence, tournoierais jusqu'à la fin, pour que le monde, tout autour, tournoierais jusqu'à la fin, pour qu'étourdis tombent les jours.

mercredi 3 décembre 2008

L'heure mauve

Il ferait bon. Ce serait le petit matin. Tu marcherais dans l'herbe, pieds nus. La rosée sur ta peau te ferait frissonner. À un souffle de l'horizon, il n'y aurait que toi pour accueillir le jour. Heure mauve. De la paume de ton rêve, tu laisserais la part dorée de tes iris réchauffer le ciel.

mardi 2 décembre 2008

L'Amoureux 3

Il y aurait des lumières partout. L'Amoureux le lui avait promis.

À la fenêtre, dans les arbres, au ciel, tout autour.

Il y aurait des lumières partout.

Alors l'Amoureux avait enfilé sa cape, sa cape pour voler, et avait tourné très vite sur lui-même...

De sa fenêtre, la fée l'avait vu tournoyer dans les airs et s'élever très haut dans la nuit.

C'était une nuit noire, une nuit sans étoile.

Elle avait fermé les yeux puis les avait réouverts aussitôt.

C'est alors qu'une pluie de fils scintillants avait troué le ciel d'or.

À la fenêtre, aux arbres, dans le ciel, tout autour, leur regard n'étaient plus que lumière.

coups de coeur

Dans une semaine, en classe, il me faudra lire quelques textes de création. J'aimerais peut-être en piger un, deux, ou trois, ici et là sur ce blog. Et je me suis dit que vous pourriez m'aider à en choisir, qu'il serait bien de voir lequel ou lesquels vous ont touchés, marqués, fait plaisir.

Ça vous tente?

La maison



Ils vivraient dans cette maison immense, tout au bout d'un long chemin de terre, cette maison immense avec une cave et un grenier, un atelier et une chambre pour écrire.

lundi 1 décembre 2008

L'anniversaire

Elle s'était éveillée, le cœur battant, comme lorsque toute petite, elle courrait, dès l'aube, vers le lit de papa et maman, pour se blottir entre leurs bras, puis déballer ses cadeaux avant même que le soleil ne se lève.

C'était son anniversaire.

À ses côtés, l'Amoureux dormait toujours, ses rêves encore frais sur le visage. Les petits chats, sous la couette, ronronnaient, cœurs paisibles. Sur la commode, une enveloppe, puis deux, quelques cadeaux tout emballés. Ceux de papa et de maman qui, dans leur lit, loin là-bas, étaient aussi, bien éveillés.

L'anniversaire

Au réveil, de jolies cartes, des mots doux de très très loin.

De beaux papiers à déchirer, du fleuri sur l'oreiller.

Les petits chats, sur la couette, s'agitent, rubans aux pattes.

Matin sucré, matin de fête.
Sur la table, une chandelle.

Matin de fête, matin lumière.

Le petit gris a les moustaches roussies.

dimanche 30 novembre 2008

La neige

C'était un matin de soleil. Le premier depuis trop de jours.

Il faisait chaud dans la verrière, c'était l'été, ciel d'hiver.

À sa corde, la voisine, quelques épingles, de beaux motifs.

Le carrelé faisait automne, dans le vent, un souffle de neige.

samedi 29 novembre 2008

Vision

De nouveau ces matins, tout sourire, sous la couette, ces levers, pieds nus, dans la cuisine déjà lumière, ces longues marches sous le ciel pour aller, puis revenir ...

Elle retrouverait sa rivière, ses champs, sa tuque et ses mitaines, ne craindrait plus le temps, joues rosies, yeux brillants ...

Sortirait ses billes et ses boîtes à boutons, ses ficelles, ses bobines, ses pastels à émotions. Reprendrait ses toiles, ses tablettes et ses papiers, s'y tracerait couleurs, sans attendre, éveillée ...

Elle fouillerait le jour, ses aplats, sa lumière, trouverait les mots pour reprendre la route, trouverait les mots pour reprendre à nouveau, ses carnets, ses crayons, son regard, sa vision .

jeudi 27 novembre 2008

Envolée


Là-bas les blancs
ne seraient plus envolés
Elle soufflerait dans l'air
Effleurerait le ciel
de ses paupières
immobile

mercredi 26 novembre 2008

Échos


Et puis, ce silence, l'écho de la nuit sur la vitre.

Elle aurait aimé voir le ciel, ouvrir les yeux plus grand, encore.

Entendre, peut-être, ce qu'elle avait tu, loin là-bas.

mardi 25 novembre 2008

Averse




Il avait dit ne pleure pas, regarde, la neige.